PROUDHON Pierre-Joseph



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Pierre-Joseph Proudhon [1809-1865]

Né, dans une famille modeste d’origine paysanne, Proudhon est contraint d’interrompre sa scolarité malgré des résultats brillants. Il devient correcteur d’imprimerie et se forge, à la faveur de son parcours professionnel et de ses voyages, un esprit critique exceptionnel. Lauréat d’un concours organisé par l’Académie de Besançon, il obtient les moyens de se consacrer à l’écriture. Loin de répondre à l’attente de ses commanditaires, il publie, en 1840 , Qu’est-ce que la propriété ?, dont la formule métaphorique « La propriété c’est le vol », provoque un énorme scandale auprès des élites et l’admiration du jeune Marx.


Dans Philosophie de la misère (1846), il modère sa critique radicale du capitalisme et prend ses distances avec le concept marxien de lutte des classes. Sa théorie de l’équilibrage des forces économiques existantes lui vaut les sarcasmes de Marx. Désormais, son anticapitalisme est étroitement lié avec un anti-étatisme non moins déterminé. En témoigne la formule saisissante : «La concurrence, c’est la guerre civile, mais le monopole, c’est l’achèvement des prisonniers ». Sa référence omniprésente aux idées de justice, de liberté et de solidarité le conduit à substituer systématiquement le lien horizontal au lien vertical dans une perspective de Fédéralisme autogestionnaire. Il pose là les bases théoriques de la doctrine anarchiste. C’est à cette condition, et cette condition seulement, que peut s’exprimer « La force collective qui n’est autre ici que la mutualité même ».


Les développements en France de l’économie sociale et de la mutualité doivent beaucoup à ce rejet des rapports hiérarchiques, même si selon Proudhon « il y a mutualité et mutualité ». Le rôle des sociétés de secours mutuels lui paraît en effet auxiliaire : « Je considère les SSM, telles qu’elles existent aujourd’hui, comme de simples transitions au régime mutuelliste » . Il prend soin, toutefois, de distinguer fondamentalement les mutuelles des compagnies d’assurances, qualifiées de «compagnies de parasites ».

En revanche, son intérêt pour les différentes formes de coopération, la mutualité de crédit surtout, apparaît mieux établi. La création de la Banque du peuple, qui attire rapidement 12 000 souscripteurs, connaît un réel succès. Et, si son emprisonnement, en octobre 1849, ruine son projet d’une organisation démocratique du crédit, il ne peut compromettre l’élan du coopératisme de base impulsé par la Révolution de février. Les idées mutuellistes et autogestionnaires de Proudhon ne cesseront de constituer, pour le meilleur et pour le pire (on pense à son antisémitisme et sa misogynie) un ferment pour le mouvement ouvrier français en construction, sous les traits d’un courant anarchosyndicaliste opposé à celui du socialisme marxiste.



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