Dernier côté du carré magique des valeurs mutualistes, la démocratie n’est certainement pas le moindre. Tout recul dans ce domaine met en péril l’existence même de la pratique mutualiste, comme l’attestent des revers institutionnels récents, ayant conduit parfois à la démutualisation.
Le principe de démocratie fixe une ligne de partage fondamentale entre le statut de l’adhérent mutualiste et celui de simple client de l’entreprise commerciale. L’adhérent d’une mutuelle n’acquiert pas seulement un droit à prestation ou à un service par sa cotisation, mais également le droit et le devoir de participer à la prise des décisions et à leur application. L’absence de buts lucratifs s’affirme, dans ces conditions, déterminante pour que les sociétaires puissent assumer pleinement leur double fonction d’assuré et d’assureur.
La complexité des problèmes gestionnaires, surtout dans les grandes organisations mutualistes, tend à éloigner les sociétaires des lieux véritables où se prennent les décisions. La tentation existe d’assimiler la règle démocratique à une contrainte, contrariant la réactivité nécessaire des groupements face aux mutations incessantes de l’économie et de la société. La mise en œuvre de la formule emblématique « une personne, une voix », proclamant l’égalité imprescriptible des adhérents, revêt trop souvent un caractère formel. Passer de la démocratie implicite à la démocratie explicite s’affirme comme un impératif de notre temps.
Les outils existent permettant à la Mutualité de s’affirmer pleinement comme « la forme organique de la démocratie », définie par Léopold Mabilleau, à la naissance de la FNMF. Un effort considérable de volonté et d’imagination s’impose pour préserver et élargir le rôle pivot de l’adhérent. Le potentiel démocratique constitué par les cent mille élus mutualistes doit enfin pouvoir s’exprimer à pleine puissance.
Les quatre points cardinaux constitués dans la longue durée par la pratique mutualiste - solidarité, liberté, indépendance et démocratie - forment un ensemble éthique d’une cohérence et d’une qualité exceptionnelles. L’excellente notoriété de la Mutualité, en matière d’image, lui doit beaucoup. L’avenir mutualiste se joue, très largement, sur le terrain des valeurs. Pour se développer, les mutuelles ont besoin de renouveler et d’élargir en permanence ce patrimoine.