VIENNEY Claude


VIENNEY Claude (1929-2001)

Tous les spécialistes de l’économie sociale et de la coopération reconnaissent en Claude Vienney le chercheur à l’argumentation théorique la plus convaincante et l’observation la plus fine des organisations coopératives au XXème siècle.

Parisien de quatrième génération, Claude Vienney naît en 1929 « sur le macadam » . Toute sa vie fut profondément marquée par ses origines protestantes. Maître d’université à Paris-I– Sorbonne les dernières années de sa carrière, ses élèves appréciaient ses qualités de rigueur et de justesse qui les poussaient à améliorer sans cesse leurs capacités d’analyse. Sa méthodologie du travail de recherche était un enseignement à part entière. Il conduisait l’élève à produire le meilleur.

Fils de pasteur protestant, il choisit de suivre un cursus capable de lier vocation et profession ; il serait juge pour enfants , « c’était plus une influence familiale qu’un goût profond » disait-il de ce choix. Il fait donc des études de droit, et s’intéresse tout particulièrement au contenu économique de ses études. Il se passionne aussi pour l’histoire du syndicalisme. Etudiant, il décroche un poste à mi-temps de secrétaire de rédaction de la revue Coopération, à la Société Générale des coopératives de consommation (SGCC), et décide alors de réaliser sa thèse sur les coopératives (Vers une analyse économique du secteur coopératif, Paris, Bureau d’études coopératives communautaires, 204 p., 1961).

Sa thèse « déclenchera un séisme » selon André Chomel, numéro deux de la Caisse centrale du Crédit coopératif (CCCC), dont il reçoit des félicitations, ainsi que celles de Lacour, alors président de la CCCC ; en même temps, de vives réactions éclatent dans les milieux coopératifs de consommation.


Brillant secrétaire de rédaction durant une dizaine d’années, de 1952 à 1962, il devient directeur de stages à l’Institut des sciences sociales du travail (ISST), pour travailler à la formation des responsables syndicaux, « des adultes engagés ». Il entreprend en même temps une activité de recherche et d’enseignement sur les coopératives, au Collège coopératif de Paris dirigé par Henri Desroche.

Vienney et ses copains créeront une section syndicale à l’ISST, initiative considérée comme scandaleuse, dira Vienney. … « J’ai eu un intérêt équivalent pour les syndicats et pour les coopératives…quand j’ai quitté les coopératives de consommation pour travailler avec les syndicats, j’avais plutôt l’impression d’une promotion du point de vue de mes intérêts ».

Il est alors invité à quitter l’ISST, pour entrer à l’UR12 de l’université de Paris-I. Toujours militant syndical, il participera activement à la grande bataille pour l’obtention d’un statut des maîtres-assistants.

C’est durant cette période de 1969 à 1982 que Claude Vienney travaille de façon plus systématique et plus complète comme universitaire, à la fois à l’universite de Paris-I et au centre de recherches coopératives de l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). « Cette période la plus complète correspond à mon métier d’universitaire et donc d’enseignant-chercheur » précisera lui-même Claude Vienney.

Mais le centre de recherches coopératives de l’EHESS disparaîtra au moment du départ à la retraite de Henri Desroche et Claude Vienney ne travaillera plus qu’à Paris-I de 1982 jusqu’à sa retraite en 1990.

Lorsque le 15 décembre 1981 est créée la Délégation à l’économie sociale, l’université de Paris-I lance alors, dès la rentrée universitaire 1982, son diplôme d’études supérieures en économie sociale – DESUP - et l’on demande à Claude Vienney, le spécialiste, de s’en occuper. Claude Vienney, à ce moment de sa carrière, souhaite consacrer une part plus importante de son travail à la formation d’adultes et désire prouver, aussi bien à lui-même qu’à Desroche, « que l’on pouvait faire ça, à Paris-I ».


Parallèlement, Claude Vienney crée la banque de travail inter-universitaire (BTI) pour la documentation des programmes de recherche et d’enseignement sur l’économie sociale et souhaite l’informatiser ( Projet intégré France-Québec - voir le CIRIEC-Canada). Projet ambitieux, en avance de dix ans, qui connaîtra une courte existence, malgré un appui financier que lui accordera son ex-camarade de classe, Michel Rocard, alors ministre du Plan.

Les cours en économie sociale ne se multiplient pas à travers la France et la BTI n’a pas la portée que l’on en attendait. Même à Paris-I, le diplôme est abandonné faute de participants. A la même époque, des coopératives de consommation connaissent de grandes difficultés (1984-85). Vienney écrit alors dans la Revue des études coopératives, mutualistes et associatives (RECMA) « … le mouvement, comme mouvement, avait quand même perdu de sa vitalité. Disons que je l’ai ressenti intellectuellement quand même, comme la fin d’une histoire ».

Le jour de son départ à la retraite, il dira à ses collègues : « J’ai toujours été pris par ces deux pôles : la vocation et la profession…. J’ai essayé de travailler dans un champ où l’on peut argumenter sur ces deux critères : la vérité et la justice ». C’est en effet sur une trajectoire de vérité et de justice qu’il entraînait invariablement les étudiants durant leurs travaux de recherche.

Claude Vienney écrivit "l’économie sociale " ( Vienney Claude, l’économie sociale, Paris, La Découverte, 1994) en 1994. Il y faisait le constat que les problèmes rencontrés par les grandes organisations coopératives et mutuelles d’un certain âge « viennent de ce qu’elles se sont beaucoup transformées depuis leurs origines. Leurs activités ne sont plus délaissées par, mais, en concurrence, avec celles des entreprises de type capitaliste ».


Claude Vienney est décédé le jeudi 12 juillet 2001. Il laisse une bibliographie très importante sur l’analyse de l’organisation coopérative et de l’économie sociale, qui influença de nombreux travaux de recherche dans le monde francophone, et particulièrement au Québec, où il participa lui-même à de nombreux travaux de recherche (Université de Sherbrooke – Ciriec Montréal – Université du Québec à Chicoutimi), colloques et séminaires.

L’université de Sherbrooke lui décerna en 1990, un doctorat honoris causa pour l’intégralité de son œuvre sur les coopératives.





La bibliographie de Claude Vienney peut être consultée sur le catalogue HECtor

Une bibliographie exhaustive est disponible dans l’ouvrage « Coopération et Economie sociale au second XXème siècle », Claude Vienney, les cahiers de l’économie sociale n° 1, l’harmattan, 2002.



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